Bicentenaire de la naissance de
Baudelaire
Les fleurs du Mal & Spleen de Paris
Création danse et théâtre
Théâtre des Grottes, Genève
du 28 au 31 Octobre 2021
Chaque époque à son Baudelaire et, celle-ci sera le Baudelaire selon l’acteur et metteur en scène Alexandre Païta avec un programme qui lancera les commémorations du bicentenaire de la naissance de Baudelaire (1821-2021). Dans le territoire intangible de la culture, Baudelaire arrive à 2021 avec une fraîcheur et une actualité souveraine, avec le prestige de sa pensée et de son style intact. Son bicentenaire doit être célébré par toutes et tous ceux qui aiment la culture en général la littérature en spécial, des domaines à qui M. Païta offre une totale dévotion.
Dans un spectacle théâtralo-poétique, musical et chorégraphique qui est l’aboutissement d’un travail né d’une longue maturation (bien avant l’enregistrement de 2017 du CD avec 21 pièces de Les Fleurs du Mal et de Le Spleen de Paris) on trouve un programme signalant la rencontre passionnelle et bouleversante de M. Païta avec Baudelaire, le chantre de la modernité ou le « Dante d’une époque déchue », selon l’expression de Barbey d’Aurevilly.
Né poète comme on naît petit, grand, blond, brun, noir ou blanc, avec les yeux châtains ou bleus, Baudelaire a formulé que « c’est à la fois à travers la poésie, par et à tra-vers la musique que l’âme entrevoit les splendeurs situés derrière le tombeau ». Il y a une profonde inspiration plastique dans Les Fleurs du Mal et on sait qu’il est entré dans la carrière littéraire comme critique d’art. Baudelaire a été initié aux arts plastiques peut-être par son père qui maniait le pinceau. Dans Mon coeur mis à nu, Baudelaire se proposait de « glorifier le culte des images, ma grande, mon unique, ma primitive passion ».
Dans le spectacle conçu par Alexandre Païta et Melissa Cascarino on trouvera une caverneuse et lumineuse correspondance entre les royaumes du poétique, du musical et du plastique, un antre où les corps chavirent et succombent à la puissance sensorielle de la poésie et sombrent dans une eau chatoyante.
On devine au loin la danse des Bacchantes et des Satyres pendant que la voix des acteurs nous offre le voyage entre la vitupération haletante du Chant d’Automne et la fatigue douce et mâchouillée qu’on écoute dans Les Bienfaits de la Lune. Plus que deviner la danse, on aura une Bacchante personnifiée par Melissa Cascarino.
Les spectateurs en cercle, le piano à queue au centre, les voix dans les mots de Baudelaire, la musique et la danse ne forment qu’une seule et même cellule qui concentre des flux magnétiques qui se diluent et glissent les uns dans les autres, un organisme vivant qui repose sur des fréquences cosmiques que seul un rapport poétique au monde sait délivrer. Ces entrelacs de textures génèrent un prisme que chaque personne présente pourra traverser pour repousser les bords du monde. C’est l’immanence de l’essence poétique qui est là présente en toute chose, tout corps et tout endroit.
Alexandre Païta accompagné par Annalisa Stagliano au piano donne un récital poétique et musical en « jouant » des extraits des Fleurs du Mal et du Spleen de Paris de Charles Baudelaire dont c’est le cent cinquantième anniversaire de la mort. Alexandre Païta est un habitué des poètes : sa fréquentation fiévreuse de Gustave Roud, Rimbaud, Verlaine ou encore Prévert et Lorca lui a donné assise et conviction dans la manière de les approcher. L’acteur interprète littéralement ces poèmes illustres, comme une partition de musique. Il ne les récite pas ! Quel défi et quel parti-pris ! Alexandre Païta transcende littéralement cette sublime poésie tant il l’habite de tout son cœur et de toutes ses tripes ! Le spectateur ou l’auditeur (un superbe CD vient de sortir) n’est pas un seul instant lâché ! Pris à la gorge, giflé par ces poèmes ressuscités, abasourdi par la géniale fusion de la poésie et de la musique, les choix musicaux, Bach, Mahler ou encore Satie sont étonnants et appropriés, le spectateur entend la voix particulière et revenue de longs voyages de l’acteur envahir sa conscience pour faire de son intimité un espace de poésie rare, un moment d’éternité…
L’entreprise d’Alexandre Païta est une réussite absolue par son audace et sa crédibilité. On se damne à l’écoute de l’Homme et la Mer et de l’Albatros. Merci monsieur Païta, les prises de risque réussies sont si rares aujourd’hui. L’acteur annonce une suite, nous l’attendons avec impatience.
Comme une odeur…
Baudelaire, à l’occasion du bicentenaire de sa naissance – un instant fort et poétique, un spectacle qui était à voir du 28 au 31 octobre au Théâtre des Grottes.
À l’origine des spectacles d’Alexandre Païta, il y a une image, des visages. Souvent le sien expressif et fort. Il y a aussi ceux des autres qui partagent la scène avec lui comme son prochain spectacle prévu pour mars 2022 : Elektra. Les toujours très esthétiques affiches de ses spectacles le montrent : il y a comme une odeur de puissance qui se dégage, on sent chez ce metteur en scène et comédien l’intensité dramatique. Dans le grand corps des styles de théâtre, Alexandre Païta défend le sien : le texte est tout.
Sur la scène s’impose la laque noire d’un piano à queue. L’effet intime est à l’image de la musique de chambre. Une image qui semble en conflit avec le dandy à la vie dissolue qu’était Baudelaire, ce qui confirme que les révolutions (politiques, esthétiques ou littéraires) débutent dans la rue et se terminent dans les salons.
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- Interprétation: Alexandre Païta
- Danse et chorégraphie: Melissa Cascarino ↗
- Musique: Annalisa Stagliano
- Texte: Thibaud de Montenach
- Création lumière: René Donzé
- Régie: Aurélien Gategno
Billetterie Ville de Genève:
- Espace Ville de Genève, Boulevard Carl-Vogt 2
- Maison des arts du Grûtli, 16 rue Général-Dufour
- Cité Seniors, 28 rue Amat
Réservations par téléphone:
- Suisse 0800 418 418 gratuit
- Etranger 0041 22 418 3618 payant
Sur place tous les jours de représentation au Théâtre des Grottes, rue Louis Favre 43, 1201 Genève
Étudiants CHF 20.-
AVS CHF 25.-
Tarif plein CHF 30.-
Photos: Geoffroi Baud
Théâtre des Grottes
Rue Louis-Favre 43, 1201 Genève
Octobre 2021
Alexandre Païta
Né à Buenos Aires (Argentine) de nationalité française, Alexandre Païta vit à Genève depuis 1971. Il est élevé dans l’univers de la musique et se trouve dès son plus jeune âge entouré par son père, le chef d’orchestre Carlos Païta, avec qui il apprend l’exigence artistique. La vocation artistique et le choix de se tourner vers le théâtre se fait très tôt. Cette influence musicale sera le moteur de son travail, où rythmes, phrasés, couleurs et précision de l’émotion dominent l’interprétation.
Sa passion pour le théâtre le poussera à s’inscrire au conservatoire d’Art Dramatique de Genève qu’il fréquentera pendant quatre ans. Il perfectionnera ensuite sa formation par différents stages à l’étranger.
Païta a oeuvré comme metteur en scène pour des productions telles que Pour l’Amour de Shakespeare.; Veni, Vedi, Vive ; Le Miroir ; Du Studio au Théâtre ou encore SOS Liberté de W. Saroyan. Plus récemment, sa mise en scène de La Mouette de Tchekhov et Antigone de Jean Anouilh ont reçu un accueil extrêmement chaleureux au Théâtre des Grottes à Genève. Féru de poésie, il aime à mêler celle-ci avec la musique. C’est à plusieurs occasions qu’il a participé et mis en scène des spectacles de ce genre où, seul sur scène, il interprète les oeuvres de Baudelaire, Rimbaud, Verlaine, Burnat-Provins, Prévert, Pasolini, Lorca (et bien d’autres), accompagné par un instrument. En 2007, c’est avec Micheline Larpin et la pianiste Annalisa Stagliano qu’il présente à Genève et en France Les Merveilleux Nuages.
Depuis 2012, Païta entame une fructueuse collaboration avec le célèbre metteur en scène français Jean-Pierre Raffaëlli, avec qui il monte notamment un spectacle en hommage aux grands poètes suisses Roud, Cingria et Ramuz. Puis suivent Les Sonnets et Richard III de Shakespeare, dans une version adaptée de Carmelo Bene (2014) et le Requiem de Roud (2016). Sans tourner le dos au théâtre, il fait du cinéma et tourne en 2011 avec le réalisateur Jean-Luc Godard dans le film Adieu au langage, prix du Jury au Festival de Cannes en 2014 et Best Picture Awards aux USA.
En 2017, pour commémorer la mort du poète Charles Baudelaire, il a enregistré un disque intitulé Baudelaire, qui regroupe une vingtaine des plus célèbres poèmes de l’auteur. En avril 2017, il interprète ces poèmes dans un récital au Temple de la Fusterie à Genève. Suite au grand succès de ce récital, Païta a redonné ce même récital à Nyon et à Genève au mois de novembre 2017. Sa trilogie de La Mouette de Tchekov, Antigone d’Anouilh et La Maison de Bernarda Alba de Lorca emmène le public dans la passion du théâtre dans la chair, la tension vers la beauté, le combat contre l’injustice, la lutte pour la réalisation du désir chère à Alexandre
Païta.
En 2020 et 2021 : Paris Récital Baudelaire, Lisbonne Récital Baudelaire, festival d’Almada L’Origine du Monde de Ana Rocha, création mondiale, Genève L’Episode de la Vie d’un artiste, création de Jean-Pierre Raffaëlli, La Tempête de William Shakespeare et Noces de Sang de Lorca.
Thibaud de Montenach
« De la musique avant toute chose », fut mon diapason. Il influença mon parcours en étant d’abord saxophoniste avant de devenir un joueur de « setar ».
Le théâtre, c’est la vie, mais la vie, c’est aussi du théâtre. Je ne l’ai donc pas choisi, c’est plutôt lui qui m’a choisi pour me permettre de monter sur scène. J’ai eu ainsi la chance de jouer dans des pièces aussi diverses et variées que la « Belle Vie » de Jean Anouilh, « Ce soir on improvise » de Pirandello, la « Cantatrice Chauve » de Ionesco ou encore le « Roi Lear » de Shakespeare sans oublier Alfred de Musset et Rousseau.
La poésie fut une autre révélation à travers l’ancienne troupe des Ormeaux. Elle m’amena à participer à des marathons orphiques à Genève, Paris et Bruxelles où j’ai pu lire des poètes contemporains tout comme aujourd’hui mes propres écrits. J’ai un diplôme d’interprétation au Conservatoire Populaire de Genève mais qu’importe l’image puisque « magie » est son anagramme, et qu’elle n’a pas encore dit son dernier mot.
Thibaud
L’Oiseau du Paradis